CHAPITRE 14

 

Je me suis réveillé une nouvelle fois, avec une sensation d’engourdissement généralisé… comme quand on se rince les mains après les avoir plongées dans du détergent ou dans du white-spirit, mais l’effet s’était étendu à tout le corps. Il s’est vite dissipé quand mon esprit s’est ajusté à son nouveau système nerveux.

Le léger frisson de l’air conditionné sur la chair exposée. J’étais nu. J’ai levé la main et j’ai touché la cicatrice au-dessus de mon œil.

Ils m’avaient ramené.

Au-dessus de moi, le plafond était blanc, comme l’éclairage. Je me suis soulevé sur les coudes et j’ai jeté un coup d’œil. Un autre frisson, cette fois-ci interne, m’a parcouru quand j’ai vu que j’étais dans la salle d’opération. À l’autre bout de la pièce attendait une plate-forme chirurgicale d’acier poli, avec toutes les options, les rigoles pour l’écoulement du sang et les bras repliés de l’autochirurgien suspendu comme une araignée au-dessus. Aucun des systèmes n’était actif, mais le mot « stand-by » clignotait sur les petits écrans fixés dans le mur et sur le moniteur à côté de moi. Je me suis approché de l’écran pour lire la check-list qui défilait.

Ils avaient programmé l’autochirurgien pour me mettre en pièces.

Je me levais quand la porte s’est ouverte. La femme synthétique est entrée, avec deux médics sur ses talons. Le blaster à particules était rangé à sa ceinture et elle portait des vêtements qui m’étaient familiers.

— Vos habits, a-t-elle dit en me les jetant. Habillez-vous.

Un des médics a posé la main sur son bras.

— Les procédures…

— Ouais, a dit la femme avec une grimace. Il va nous faire quoi, un procès ? Si vous pensez que nous ne pouvons gérer que de simples enveloppements, j’irai dire deux mots à Ray afin de traiter nos affaires avec quelqu’un d’autre.

— Il ne parle pas de la réintégration, ai-je observé en enfilant mon pantalon. Il veut effectuer les tests de traumatisme d’interrogatoire.

— Qui vous a dit d’intervenir ?

— Comme vous voulez, ai-je dit en haussant les épaules. Où allons-nous ?

— Parler à quelqu’un, a-t-elle dit avant de se tourner vers les médics. S’il est qui il dit être, le trauma ne sera pas un problème. Et, s’il ne l’est pas, il revient directement ici.

J’ai continué à m’habiller, aussi cool que possible. Je n’étais pas encore sorti de l’auberge. Ma tunique et ma veste étaient intactes, mais le bandana avait disparu, ce qui m’ennuyait. Je l’avais acheté quelques heures auparavant. Pas de montre non plus. Décidé à ne pas faire d’histoires, j’ai scellé mes bottes et je me suis relevé.

— Alors, on va voir qui ?

La femme m’a jeté un regard sombre.

— Quelqu’un qui en connaît assez pour vérifier vos conneries. Ensuite, à titre personnel, je pense que nous vous ramènerons ici pour vous disperser.

— Quand tout ceci sera terminé, je pourrai peut-être convaincre un de nos groupes de vous rendre visite… Dans votre vrai corps. Ils voudront sans doute vous remercier de votre soutien.

Le blaster est sorti de son étui avec un bruit léger et s’est posé sous mon menton. Je n’ai pratiquement rien vu. Mes sens récemment réincorporés ont ramé pour réagir, une éternité trop tard. La femme synthétique s’est penchée près de moi.

— Ne me menace jamais, sac à merde, a-t-elle murmuré. Tu fais flipper ces clowns, ça les paralyse et ils pensent que tu as assez de poids pour les entraîner au fond. Ça ne marche pas avec moi. Compris ?

Je l’ai regardée du coin de l’œil. Je ne pouvais pas faire mieux avec la tête bloquée par le flingue.

— Compris.

— Bien, a-t-elle dit dans un souffle en retirant le blaster. Si tout se passe bien avec Ray, je m’inclinerai et je te présenterai mes excuses avec les autres. Mais, jusque-là, tu n’es rien d’autre qu’un tas de viande potentielle qui chie dans son froc pour sa pile.

Nous avons arpenté des couloirs au pas de course avant de grimper dans un ascenseur identique à celui qui m’avait conduit à la clinique. J’ai de nouveau compté les étages et, quand nous sommes sortis dans le parking, mon regard s’est porté involontairement vers la porte par laquelle ils avaient emmené Louise.

Mes souvenirs de la torture étaient flous, le conditionnement des Diplos enfouissait volontairement l’expérience pour éviter le traumatisme. Mais deux jours correspondaient à dix minutes en temps réel. J’avais sûrement passé une heure ou deux maximum dans la clinique, et le corps de Louise attendait peut-être encore derrière cette porte, son esprit encore empilé.

— Montez dans la voiture, a dit la femme, laconique.

Cette fois, le véhicule était plus grand, plus élégant. Il me rappelait la limousine de Bancroft. Un chauffeur était installé dans le compartiment avant, en livrée, rasé, avec le code-barres de son employeur imprimé au-dessus de son oreille gauche. J’en avais vu quelques-uns comme lui dans les rues de Bay City, et je m’étais demandé pourquoi quelqu’un accepterait de se soumettre à cette humiliation. Sur Harlan, et à l’exception des militaires, personne ne voulait être vu avec des bandes d’autorisation. Elles rappelaient trop la servitude des années de l’Installation.

Un deuxième homme attendait près du compartiment arrière, tenant négligemment un monstrueux pistolet-mitrailleur. Lui aussi avait le crâne rasé et le code-barres. J’ai bien regardé en passant et je suis entré dans le véhicule. La synthétique s’est penchée pour parler au chauffeur et j’ai augmenté le neurachem pour l’entendre.

— … Tête dans les nuages. Je veux y être avant minuit.

— Pas de problème. La circulation côtière est fluide ce soir et…

Un des médics a fermé brutalement la portière et le claquement amplifié a failli me faire sauter les tympans. Je suis resté silencieux, essayant de récupérer avant que la femme et le rasé s’installent à côté de moi.

— Fermez les yeux, a dit la synthétique en sortant mon bandana. Je vais vous mettre un bandeau pendant le trajet. Si nous vous laissons partir, ces types ne veulent pas que vous puissiez les retrouver.

J’ai regardé les vitres.

— Elles sont polarisées, non ?

— Ouais, mais votre neurachem est peut-être vraiment bon, hein ? Ne bougez pas.

Elle a attaché le tissu rouge avec une efficacité prouvant une longue pratique et l’a bien ajusté, couvrant la totalité de mon champ de vision. Je me suis installé confortablement dans le fauteuil.

— Il n’y en a que pour deux minutes. Restez assis et ne regardez pas. Je vous dirai quand l’enlever.

La voiture a grimpé. Elle était probablement à l’extérieur puisque j’entendais le vent contre la carrosserie. Une odeur de cuir avait remplacé la puanteur fécale de mon voyage aller et le fauteuil se moulait à mon corps. J’avais grimpé quelques échelons.

C’est seulement temporaire, mec. J’ai eu un léger sourire en entendant l’écho de la voix de Jimmy dans ma tête. Il avait raison. Au sujet de l’homme que j’allais voir, deux choses étaient claires. « Ray » ne voulait pas venir à la clinique ; il ne voulait même pas être vu dans les environs. Cela démontrait sa respectabilité, son aura de puissance, une puissance capable d’accéder aux données des mondes extérieurs. Il se rendrait vite compte que les Corps diplomatiques étaient une menace en l’air et, peu de temps après, je serais mort. Vraiment mort.

Ta conduite est dictée, mec.

Merci, Jimmy.

Après quelques minutes, la femme m’a dit de retirer le bandeau. Je l’ai remonté sur mon front avant de le rattacher convenablement. À ma gauche, le gorille au pistolet-mitrailleur a souri. Je lui ai jeté un regard curieux.

— Il y a quelque chose de drôle ?

— Ouais, a dit la femme sans détourner les yeux des lumières de la ville. Vous avez l’air d’un crétin fini.

— Pas d’où je viens.

Elle s’est retournée et m’a dévisagé avec pitié.

— Vous n’êtes pas « d’où vous venez ». Vous êtes sur Terre. Essayez de vous comporter en indigène.

Je les ai regardés tour à tour – le pistolero encore souriant, la synthétique et son expression de mépris poli –, puis j’ai haussé les épaules et levé les deux mains pour détacher mon bandana. La femme s’est concentrée de nouveau sur les lumières de la ville noyée sous nos pieds. La pluie semblait ne jamais vouloir s’arrêter.

J’ai frappé sauvagement à hauteur de tête, des deux côtés. Mon poing gauche a heurté la tempe du gorille avec assez de force pour briser l’os et il s’est effondré aussitôt. Il n’avait pas vu le coup venir. Mon bras droit était encore en mouvement.

La synthétique s’est dépliée, probablement plus vite que j’aurais pu frapper, mais elle m’avait mal lu. Son bras était levé pour protéger son visage alors que j’étais déjà sous sa garde. Ma main s’est refermée sur le blaster à sa ceinture, l’a déverrouillé et j’ai écrasé la détente. Le faisceau a illuminé l’habitacle et une partie importante de la cuisse droite de ma voisine a éclaté en lambeaux sanguinolents avant que les circuits de surchauffe arrêtent le tir. Elle a hurlé, plus de colère que de douleur, et j’ai dirigé le canon vers le haut avant de tirer de nouveau, cette fois en diagonale. Le blaster a creusé un canal large comme la main à travers son corps et la banquette derrière. Du sang a giclé partout dans l’habitacle.

Le blaster s’est coupé de nouveau et la pénombre a repris ses droits. À côté de moi, la synthétique faisait des bulles en soufflant, puis la section de torse à laquelle était attachée la tête est tombée sur sa gauche. L’effet était bizarre. On aurait dit qu’elle se refroidissait le front sur la vitre battue par la pluie. Le reste de son corps est resté droit, la plaie monstrueuse cautérisée par le faisceau.

Partout régnait une odeur de viande cuite et de composants synthétiques grillés.

— Trepp ? Trepp ?

Le chauffeur hurlait dans l’interphone. J’ai essuyé le sang de mes yeux et j’ai regardé l’écran incrusté dans l’appuie-tête avant.

— Elle est morte, ai-je dit en brandissant le blaster. Ils sont morts tous les deux. Et tu es le prochain si tu ne te poses pas maintenant.

Le chauffeur a repris courage.

— Nous sommes à cinq cents mètres au-dessus de la baie, mon pote, et je pilote. Qu’est-ce que tu peux faire contre ça ?

J’ai choisi un point dans la paroi entre les deux cabines, débranché le circuit de surchauffe et je me suis protégé le visage de la main.

— Eh, qu’est-ce que…

J’ai tiré dans le compartiment du chauffeur, sans dispersion. Le faisceau a percé un trou d’un centimètre de diamètre et, pendant quelques instants, il a plu des étincelles dans l’habitacle : le blindage essayait de résister. Puis il a lâché quand le faisceau a traversé. Il y a eu comme un bruit de court-circuit et j’ai relâché la détente.

— Le prochain traverse ton fauteuil. Mes amis me réenvelopperont après nous avoir repêchés dans la baie. Toi, je vais te découper en tranches à travers la paroi. Même si je manque ta pile, ils auront du mal à savoir dans quel morceau elle est, alors, tu poses ta merde tout de suite !

La limousine a viré sur l’aile, en perdant de l’altitude. Je me suis enfoncé dans mon fauteuil, au milieu du carnage, essuyant le sang de mon visage avec ma manche.

— C’est bien, ai-je dit, plus calme. Maintenant, amène-moi près de Mission Street. Et réfléchis avant de demander de l’aide. S’il y a une fusillade, tu meurs le premier. Compris ? Je parle de vraie mort. Je te grillerai la pile, même si c’est la dernière chose que je ferai avant qu’ils aient ma peau…

Son visage m’a regardé sur l’écran, livide. Effrayé, mais pas assez. Ou peut-être effrayé par quelqu’un d’autre. Quelqu’un qui imprime un code-barres sur ses employés n’est pas du genre à pardonner et le réflexe de l’obéissance hiérarchique suffit parfois à dominer la peur de mourir. C’est de cette façon que se mènent les guerres. Avec des soldats plus effrayés de quitter les rangs que de mourir sur le champ de bataille.

J’étais comme ça, moi aussi.

— Je te propose un truc, ai-je ajouté rapidement. Tu violes le protocole de circulation en te posant. Le Sia se pointe, t’arrête et t’enferme. Tu ne dis rien. Je disparais… Ils n’ont rien contre toi à part une infraction au code. Tu racontes que tu n’étais que le pilote, que tes passagers ont eu un petit désaccord et que je t’ai obligé à te poser. Pendant ce temps, celui pour qui tu travailles te fait sortir rapido et tu gagnes un bonus pour ne pas avoir craqué en cellule virtuelle…

J’ai regardé l’écran. Son expression a changé et il a avalé sa salive. Assez de carotte… il était temps de lui montrer le bâton. J’ai rebranché la sécurité du blaster en le soulevant pour qu’il le voie et je l’ai posé sur la nuque de Trepp.

— Moi je dis que c’est plutôt une bonne affaire…

À bout portant, le faisceau a vaporisé la colonne vertébrale, la pile et tout ce qu’il y avait autour. Je me suis retourné vers l’écran.

— Ta décision ?

Le visage du chauffeur n’était plus qu’une grimace. La limousine a commencé à perdre de la hauteur. J’ai regardé le flux de circulation à travers la fenêtre et j’ai tapoté sur l’écran.

— N’oublie pas l’infraction.

Il a eu un hoquet avant de faire un signe de tête. La limousine est tombée à la verticale à travers les voies de circulation et s’est posée durement dans une cacophonie d’alertes de collisions. À travers la fenêtre, j’ai reconnu la rue de la nuit précédente. La limousine freinait.

J’ai glissé le blaster sous ma veste.

— Ouvre.

Un geste sec de plus, et la portière s’est déverrouillée. Je l’ai fait pivoter d’un coup de pied. Les sirènes de la police hurlaient quelque part au-dessus de nos têtes. Mon regard a croisé celui du chauffeur sur l’écran et j’ai souri méchamment.

— Tu as fait le bon choix, ai-je crié en me jetant hors de la voiture encore en mouvement.

J’ai roulé au milieu des cris de peur et de surprise des passants, heurtant le trottoir de l’épaule et du dos. J’ai fini ma trajectoire dans la vitrine d’un magasin avant de me relever avec prudence. Un couple m’a dévisagé et je leur ai souri, histoire qu’ils aillent s’intéresser à d’autres magasins.

Un courant d’air est passé au-dessus de moi : le croiseur de la police suivait la limousine. Je suis resté où j’étais, rendant leur regard aux curieux qui avaient été témoins de mon arrivée peu orthodoxe. J’étais moyennement intéressant, aussi ont-ils fini par tourner les yeux vers les flashs du croiseur de la police, flottant, menaçant, derrière la limousine immobile.

— Coupez le moteur et restez où vous êtes, a craché le haut-parleur.

Une foule commençait à se rassembler, les spectateurs se poussant pour mieux voir. Je me suis appuyé contre la devanture pour estimer les dégâts dus au saut. À sentir la douleur se dissiper dans mon dos et dans mon épaule, j’avais assuré, cette fois-ci.

— Levez vos mains au-dessus de votre tête et sortez du véhicule, a lancé la voix métallique du policier.

Par-dessus la tête des badauds, j’ai aperçu le chauffeur qui s’extirpait de la limousine dans la position requise. Il avait l’air soulagé d’être vivant. Un instant, je me suis surpris à me demander pourquoi cette attitude n’était pas plus populaire dans les milieux que je fréquentais.

Trop de suicidaires, je suppose.

J’ai reculé de quelques mètres dans la foule avant de me fondre dans l’anonymat illuminé de la nuit de Bay City.

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